Histoire et technique d'un Moulin "éolien"
Historique et technique du Moulin de Rairé à Sallertaine (Vendée)

Il ne s'agit pas de retracer l'histoire de chaque moulin, ce n'est pas le but de ce site plutôt axé sur la généalogie des meuniers.

Certes, si toutes ces vieilles pierres pouvaient parler, il y en aurait des romans à écrire, n'est-ce pas "Monsieur Alphonse", mais vous, vous aviez du talent !!

En partant d'un cas précis, en l'occurence le Moulin de Rairé à Sallertaine, on va essayer de retracer l'historique de ce moulin, tout en suivant l'évolution de la technique générale des moulins "Eoliens"

Pourquoi le Moulin de Rairé ?

Lorsque l'on a près de chez-soit un tel moulin et que l'on a la chance de passer sous ses ailes presque chaque semaine et ce, depuis maintenant plusieurs années, comment ne pas s'y intéresser.

Surtout qu'il n'est pas dépourvu d'intérêt notre moulin de Rairé.

J'en conviens, il n'est ni le plus beau et son style ne caractérise pas spécialement l'ensemble des moulins de Vendée.

Mais il a tout de même des atouts en sa faveur, et pas des moindres !

D'une part, sa situation géographique en fait une de ses originalités, c'est un moulin à vent presque les pieds dans l'eau, faut-dire qu'il est planté en plein coeur du marais "Breton" à moins de dix kilomètres "à vol de mouette" de l' océan.

Il n'est pas rare, certains hivers humides, de voir l'eau arriver presqu'à son pied.

D'ailleurs, dans la première partie du siècle dernier, les "tournées" pendant la période hivernale, quand le marais était innondé, se faisaient en "Yoles". Tous ceux qui comme moi, ont eu des recherches généalogiques à effectuer dans les archives de Sallertaine, ont dû être surpris de constater le nombre de personnes dont la profession était "Yoleur"

L'altitude de Sallertaine par rapport au niveau de la mer se situant entre 0 +18 mètres c'est dire la "montagne" sur laquelle il est perché.

Ensuite, ils ne sont probablement pas nombreux les moulins à vent à être inscrits à l'Iventaire supplémentaire des Monuments Historiques, c'est le cas de Rairé et ce depuis 1974.

Enfin et surtout, c'est le seul moulin en France qui n'ai jamais cessé de tourner et ce depuis son origine...........dans les années 1550 environ et ........quelques grains.

Et ! Sans perdre son "âme", toujours mu par la seule force éolienne, toutes les fonctions du moulin utilisent grâce à une ingénieuse machinerie, la force du vent.

Sur son flan il n'y a pas trace de poulie, (comme on peu voir sur certains moulins) preuve qu'à une certaine époque un moteur à vapeur prenait le relais les journée sans vent, ou simplement par facilité.

* Tounée : Livraison de la farine et récupération du grain à moudre.

* Yole : Bateau à fond plat navigant sur les canaux des marais, poussé par une perche de bois.

* Yoleur : Celui qui effectue le transport des personnes, des annimaux ou des marchandises avec une Yole

La naissance du moulin de "Royre"

Sous le règne de Charles IX, Jacques de la Touche, seigneur des Planches (commune de la Garnache), de Coëx, Curzon, Laudarière et autres lieux, rend hommage de ses possessions à la duchesse de Thouars, dans un aveu du 2 août 1567, le moulin de Rairé y est mentionné pour la première fois.

Transcription du parchemin ci-dessus mentionnant l'édification du moulin de Rairé

(.....) Plus deux journaux de pré ou environ situés en mon fief de Royre tenant d'une part au grand estier d'aultre des prez des hoirs feu Huguez Fradez d'aultre au pré Bourdyer charrau entre deux vallans vingt sols de revenu annuels.

Item mon moulin à vent lequel ay faict édifier pour les teneurs des dits villages cy-dessus nommez sont tenus de mouldre par destroict leurs grains. Lequel moulin peutz valloir toutes charges desduictes soixante solz ou environ

Ce parchemin révèle également le nom du premier meunier, Jacques Martin, plusieurs "Jacques Marin" se succèderont aux commandes de Rairé.

Concernant les Martin, hélas, généalogiquement, les actes BMS de Sallertaine pour la période concernée, ne mentionnent pas les professions des individus ni leurs domiciles, il faudra donc s'en tenir aux infos du parchemin.

Propriété de Rairé

Propriété de la famille de la Touche jusqu'au début du XVIIe siècle, le moulin de Rairé passe ensuite entre plusieurs mains.

Si les actes notariés ne permettent pas de retracer avec présision son histoire, il semble avoir appartenu à l' Abbaye de Breuil-Herbaud (sise à Froidfond) puis à Pétronille de Gournay, femme d'un officier de marine.

Cette dernière, cède à Jean Geay farinier, le 20 février 1753, la rente de 10 livres qu'elle percevait sur le moulin.

Jean Geay doit avoir environ 39 ans lorsqu'il prend possession du Moulin de Rairé, il est marié à Françoise Bonnin, Jean décèdera le 28 juin 1777.

C'est son fils René né le 28 janvier 1742 à Rairé qui lui succèdera, celui-ci épouse le 9 février 1768 à Chateauneuf Louise Mossard, René décèdera à Rairé le 7 octobre 1803.

Ce sont les deux fils de René qui prendront la suite, Jean né le 30 octobre 1772 et qui épousera vers 1790 Marie Anne Crochet, Jean décèdera le 6 mars 1828, et René né le 6 octobre 1778, qui épousera le 4 février 1807 Marie Brisson, René décèdera le 22 juin 1820.

C'est René né vers 1792 fils de René et Marie Crochet qui continuera de faire tourner le moulin, il épousera Rose Cornu, le couple exerçait encore son activité à Rairé en 1836 avec ses deux enfants vivants, Jean René et Rose Virginie.

René est décédé à Saint Gervais en 1845, entre temps le moulin avait été cédé.

Quant à son fils, Jean René Geay né le 23 septembre 1820, j'ai retrouvé sa trace à la Guyonnière (près de Montaigu) ou il épouse le 21 mai 1850 une fille de meunier, Jeanne Angélique Rivière.

nota : Je recherche une éventuelle descendance de ce dernier couple Geay - Rivière

Transition

La consultation des tables nominatives de sallertaine m'a permis de découvrir que le moulin de Rairé n'était pas passé directement des Geay au Barreteau et pour cause, une sombre affaire d'escroquerie de la part du meunier de l'époque, en l'occurrence René Geay, qui avait dépouillé de son or un client.

Le moulin avait ainsi été saisi à son propriétaire et vendu aux enchères.

Les Barreteau déjà propriétaire du moulin de la Bourie tout proche, posèrent ainsi un pied à Rairé en acquérant un cinquième du moulin, mais sans l'exploiter, qui devint propriétaire des quatre parts restantes ? Toujours est-il que de 1839 à 1843 le moulin fut exploité par Joseph Fradin marié à Louise Brisson, en était-il le propriétaire ? ou seulement l'exploitant ?

Après 1843 on retrouve Joseph Fradin meunier à la Garnache au moulin du Potron, ou il sera déclaré mendiant lors de son décès en 1861.

C'est seulement en 1843 que les Barreteau prennent possession à part entière du moulin de Rairé.

Concernant cette affaire d'escroquerie, ce fait divers aurait-il un rapport avec un autre fait qui se serait déroulé également à Rairé, concernant un meurtre cette fois-ci ?

Rairé n'a donc pas dévoilé tous ses secrets !!!

à suivre.........

Les Barreteau à Rairé
Acte d'acquisition du moulin de Rairé en 1843 par Rose Bernard veuve Barreteau et ses deux fils Louis et Charles

En 1843 les Barreteau prennent possession de Rairé.

Les Barreteau sont les "Seigneurs de la farine" dans la région, on est frère ou cousin, on se marie de moulin à moulin.

Une quinzaine de moulins des alentours sont exploités par les Barreteau : le Rebourg à Saint Jean de Monts, le Sonnereau et la Matte à Saint Hilaire de Riez, le Moulin Neuf, Bel-Air et la Bruloty au Perrier, le Poirot, le Plessineau et la Rive à Saint Urbain, la Bourie, Rairé, Moulin Neuf, Pont-Abert et la Copechagnière à Sallertaine et la Cour à Châteauneuf .......

C'est la veuve de Louis Pierre Barreteau, Rose Bernard, qui avec ses deux fils Charles et Louis achète Rairé en 1843. Louis Pierre était né au Perrier le 9 mai 1780, il avait épousé au Perrier le 13 juin 1802 Rose Bernard, ils exploitent ensemble le moulin de la Bourie proche de Rairé, ils auront dix enfants.

Louis Pierre est décédé le 24 août 1820, donc lorsque en 1843 Rose Bernard décide avec deux de ses fils, d'acheter le moulin de Rairé, la meunerie elle connait et son soucis est d'installer chacun d'eux.

C'est donc avec Louis né 4 mars 1813 et Charles né le 29 octobre 1819, deux de ses fils, que Rose Bernard signe l'acte d'achat du moulin de Rairé.

Et c'est Charles, le cadet de la "couvée" qui prend la direction de Rairé, c'était peut-être son cadeau de mariage, puisque la même année que l'acquisition, il épouse Jeanne Vrignaud le 15 novembre 1843.

Quant à son frère Louis il continue de faire "tourner"la Bourie.

Charles et Louise Vrignaud auront sept ou huit enfants, dont la plupart morts en bas-âge. Charles décèdera le 3janvier 1874, son fils cadet Pierre Jacques né le 8 juin 1848, lui est déjà marié, il a épousé Victoire Aimée Pajot et exploite de moulin de Bastrie, c'est donc naturellement le fils ainé Charles Pierre né le 4 août 1845 qui prend la suite à Rairé.

Charles Pierre épousera en premières noces le 13 octobre 1869 Marie Pajot, de cette union naitra une fille Marie Rose le 7 juin 1871. En secondes noces, il épousera le 26 mai 1875 Marie Adeline Mossard, union de laquelle naîtra Pierre Charles le 16 août 1877.

Charles Pierre est décédé après 1906, et Pierre Charles son fils unique naturellent lui succéda.

Le moulin de Rairé en 1906

Pierre Charles Barreteau, épousera le 27 mai 1903 Ameline Marie (Amélina) Menuet, de cette union vont naître trois enfants, Pierre, Jean et Amélina, qui vont bientôt se retrouver orphelins, lorsque le 9 août 1916 à Asservillers, dans la plaine de la Somme, une balle perdue viendra terrasser leur père. Pierre Charles avait échappé au service militaire, mais il avait été reconnu apte à aller combattre l'ennemi au cours de la "grande guerre".

Amélina avec ses trois enfants en bas âge ne baisse pas les bras pour autant, avec l'aide de ses deux fils, encore très jeunes et quelques aides-meuniers, elle continue de faire tourner le moulin. Mais ses deux fils, Pierre et Jean, bien qu'élevés "dans la farine" ne veulent pas reprendre la suite, les charges du moulin sont de plus en plus lourdes, alors ce sera Amélina leur soeur avec Marcel Burgaud son mari quelle a épousé en 1933, qui en 1945 prendra à son compte le moulin de Rairé.

Marcel Burgaud et Amélina auront un fils, Marcel qui naitra en 1938, qui à son tour prendra la succession, celui-ci maintenant à la retraite a passé le "flambeau" à l'un de ses gendres, Richard Billet, qui a son tour perpétue la tradition à Rairé, consistant à produire avec la seule énergie du dieu "Eole".....

Descriptif de Rairé

A noter sur ce plan de coupe, l'inclinaison de l'axe ou arbre de couche (8°).

Ainsi, la voilure résiste mieux aux pressions du vent et l'ensemble (voilure + arbre) est parfaitement équilibré.

Ces caractéristiques techniques sont spécifiques au moulin de Rairé, par contre les principes de base, de même que les termes spécifiques des différentes pièces composant un moulin tour éolien, sont identiques pour tous les moulins basés sur ce principe.

Le mécanisme en revanche est beaucoup plus simple lorsque le moulin n'est pas équipé du système Berton. Ce qui est le cas pour une grande partie des moulins tour de Vendée, ceux du Mont des Alouettes aux Herbiers par exemple et beaucoup d'autres.

Historique des moulins éoliens

Avant d'utiliser l'énergie éolienne on savait tirer profit de l'énergie hydrolique, ceci-dit le moulin éolien apparaîtrait en Europe occidentale à la fin du XIIe siècle, vers 1180-1185.

Sur les côtes vendéennes, il est fait mention de moulins à vent dès 1190-1191.

Les molinologues admettent qu'il serait né simultanément dans le Sud de l' Angleterre ainsi que dans le Nord de la France et sur la frange méditerranéenne de l' Europe de l' Ouest.

Bien avant notre ère, les Egyptiens, les Chinois, les Perses.....avaient eu l'idée d'utiliser le vent comme énergie pour broyer les céréales. Mais il semble que le moulin occidental doit peu à l'Orient, car il est très différent dans sa structure architecturale (arbre horizontal et renvoi-d'angle). Il serait plutôt le fruit d'une rencontre des techniques de charpenterie navale qui jaillissent au XIIe et XIIIe siècle.

Profitant d'un vide juridique et d'un faible coût, le moulin à vent serait né par réaction seigneuriale (origine roturière), dans une société en proie au changement (essor démographique, engendrant besoin économique).

En effet, les juristes médiévaux avaient prévu le droit de l'eau et de la pêche, mais........... pas celui du vent !

Détails techniques d'un moulin Eolien

< Différents types de Moulins

1 - Moulin à Chandelier

2 - Moulin Turquois

3 - Moulin Tour

4 - Moulin Cavier

 

En Vendée on ne rencontre actuellement que des moulins tour, mais les premiers moulins étaient de style "turquois"

 

Principe de base d'un moulin Eolien >

Le principe de base d'un moulin éolien consiste à capter la force du vent et transformer le mouvement horizontal en un mouvement vertical, encore faut-il pouvoir capter les vents dans toutes les directions.

Pour ce faire les moulins tour sont munis d'une toiture (calotte) orientable.

Autrefois pour tourner la calotte du moulin, on utilisait une longue perche de bois solidaire de la toiture, appelée "le guivre".

Le meunier ainsi en appui sur cette perche ou aidé d'un cabestan, faisait pivoter la tête du moulin sur une glissière de chêne appelée "chemin dormant", cela, en fonction de la direction du vent.

Rairé bien entendu était équipé ainsi, mais sa tour mesurait deux mètres de moins, avec des "grands moulins" de ce type, très haut, il fallait inventer un autre système.

Une question me "turlupine depuis très longtemps et à laquelle peut-être des spécialistes sauront répondre :

Pourquoi ne pas avoir utilisé directement la force verticale dans les moulins éoliens ?

Techniquement, était-ce plus compliqué ? pas évident ! juste un arbre vertical !

Il existe actuellement des Eoliennes (sur le toit des immeubles entre-autre) basées sur ce principe.

En 1864 le moulin de Rairé adopte le "système Berton"

Pierre Téophile BERTON (1827-1894) est un jeune ingénieur parisien, dont le père avait lui même inventé un système permettant d'entoiler les ailes des moulins.

Après bien des tâtonnements, Berton met au point en 1842, un ingénieux système permettant de commander l'ouverture et la fermeture de la voilure de l'intérieur du moulin.

Les toiles de lin sont maintenant remplacées par quatres "ailes éventail" composées de onze lattes de pin d'Orégon coulissant les unes sur les autres à la manière d'un éventail.

Le meunier peu réagir ainsi en quelques secondes au caprices du vent, pour "pouiller", replier les ailes si le vent vient à "forcir" ou au contraire à "dépouiller" "envoyer la voile" en terme de marine, si le vent est régulier et de force raisonnable.

Le système "Berton"
Voilure "Berton"   Voilure traditionnelle

Avant >

L'entoilage traditionnel qui consistait à fixer de solides toiles de lin sur les ailes, pour ce faire le meunier devait grimper, non pas en haut du mat, mais en haut de chacune des quatres demi-vergues, en utilisant en guise d'échelle les "râteaux" emmanchés dans la vergue.

Cette opération à effectuer par tous les temps, parfois plusieurs fois par jour, combien de meuniers s'y sont "briser le cou" en chutant lourdement sur le sol !

En Vendée de nombreux moulins ont conservés l'entoilage classique.

< Après

Et puis tel "zorro", Berton est arrivé !! et !

Plus d'escalade, juste quelques solides cordes de chanvre qui agissent sur le différenciel, mécanisme solidaire des ailes par l'intermédiaire d'un engrenage et de tiges métalliques.

1 - Araignée ou couronne............... 2 - Vergues

3 - Verrons............. 4 - Lattes en pin d' Orégon

5 - Feuillards

L'araignée   Le différenciel

Le différenciel >

Voilà l'ingénieux système de Berton, le différenciel fixé sur l'arbre de couche, il permet grace à un simple levier qui actionne une tige métallique reliée à l'araignée située en tête d'arbre, de pouiller (fermer) et dépouiller (ouvrir) la voilure.

Toute la manoeuvre est effectuée par le meunier, sans que celui-ci n'ai à quitter son poste de travail et surtout en réagissant voire en improvisant les caprices du vent, du haut de son poste d'observatoire tout en haut de sa tour.

< L' araignée

Positionnée en tête de l'arbre de couche, l'araignée commande le déploiement des ailes, celles-ci entièrement déployées peuvent atteindre 2,20 mètres de large, soit une suface totale de 59 m2, une fois repliées, leur largeur est réduite à 22 cm soit à peine 6 m2

3e Etage "salle des commandes"

Axe central de la machinerie >

C'est à partir de ce noyau central que fonctionne l'ensemble du moulin, sur l'arbre de couche est fixé le différenciel, le grand rouet et le peloton qui transforme le mouvement horizontal en un mouvement vertical.

< Le meunier oriente les ailes

Autre innovation de Rairé, un treuil appelé "tourne-au-vent " qui s'engrène dans une crémaillère circulaire en fonte et permet ainsi de l'intérieur du moulin d'orienter la "calotte" suivant la direction du vent.

Tout en restant traditionnel quant au principe de base, le moulin de Rairé a énormément évolué au cours des siècles, toute cette machinerie ci-dessus, certes simplifiée, à l'origine était entièrement en bois , frêne, chêne et cormier.

Puis au fil du temps la multiplication des fonderies a permis d'associer les engrenages en fonte et le bois, aujourd'hui, seuls les *alluchons du grand rouet sont en cormier, l'association fonte-bois (le peloton et le grand rouet) permet d'atténuer le bruit et donne une plus grande souplesse au mouvement.

* Les alluchons : pièces de bois (cormier) emmanchés transversalement dans la couronne du grand rouet, formant la patie mâle des engrenages.

Salle de mouture 2e étage
  Les Meules  

 

1 - Oeillard

2 - Boitard : pierre tendre, concassage du grain

3 - Entrepied : pierre dure, écrasement du grain

4 - Feuillard : Pierre très dure, finissage

5 - Jointement, plâtre ou ciment

7 - Cercles de fer posés à chaud (châtrage)

6 - Silex

< Confection des meules

A l'origine, les meules étaient constituées d'un seul bloc : granit, grès ou calcaire....mais ces monolithes manquant d'homogénéité, furent remplacés par des blocs de silex liés entre-eux avec du plâtre ou du ciment, l'ensemble cerclé à chaud.

Aujourd'hui on produit des meules en matériaux reconstitués.

Ces blocs sont assemblés en trois zones

Détail d'assemblage des meules
  Origine des meules  

Si les documents font défaut pour connaître l'origine des meules au XVIe siècle, on sait qu'elles étaient de grande dimension, près de deux mètres de diamètre et....d'un seul bloc. Cet usage de n'avoir qu'une seule paire de meules centrale s'est perpétué jusqu'au milieu du XIX e siècle, jusqu'à ce qu'on puisse en ajouter une seconde paire, grâce au progrès réalisés dans le domaine de la production des pierres meulières.

Après l' Angleterre (fin XVIIIe - début XIX e siècle), c'est la France qui devint le premier pays producteur de meules, tant par la quantité que pour la qualité, celles de la Ferté-sous-Jouarre (Seine et Marne) sont réputées dans le monde entier. Elles sont composées de plusieurs blocs scellés entre eux au plâtre, voire au ciment pour les plus récentes. Une meule bien constituée est toujours exécutée de sorte que les silex les plus durs soient positionnés à la périphérie et les plus tendres vers le centre.

  Régulation et entrainement des meules  

Système régulateur >

1 - Régulateur à boule (Watt 1776)...............2 - Dos d' Ane

3 - Vis de réglage d'écartement des meules.............4 - Chaudron ou crapaudine en fonte

5 - Pignon de renvoi..............6 - Pied de meule

7 - Hérisson................8 - Vertical

9 - Meule fixe ou gisante...........10 - Meule mobile ou courante

11 - Manchon.............12 - Anille

< Mécanisme d'entrainement de la meule à Rairé jusqu'en 1864

1 - Trémie d'alimentation......2 - Gros fer ou vertical

3 - Chevalet.......4 - Archure

5 - Auget.........6 - Meule mobile

7 - Boitier d'équilibrage...........8 - Anille

9 - Manchon...........10 - Meule fixe

Régulateur

Le régulateur à boules inventé en 1776 par Jeames Watt, il règle l'écartement des meules suivant la vitesse de rotation.

< Le "Rabillage" des meules

Pour produire une farine de qualité, encore faut-il avoir des meules en bon état.

Quand le moulin tournait à plein régime il fallait "rhabiller" les meules chaque mois, aujourd'hui que le moulin a une activité plus réduite, c'est deux à trois fois par an qu'il faut procéder à cette opération.

C'est un travail pénible de plusieurs jours, qui consiste à "repiquer" les meules, afin de redonner du "mordant" aux deux surfaces qui broient le grain.

Le travail est inconfortable et il faut se protéger les yeux des éclats de silex.

< Pour ce faire il y a toute une panoplie d'outils divers, mailloches, bouchardes etc....aujourd'hui on utilise des outils au carbure, mais jadis le meunier se devait d'être aussi forgeron pour "tremper" les outils en acier.

La monte charge   La trémie

< Le monte charge

Le monte charge, par lequel les sacs de blés sont hissés jusquà la salle de mouture, il fait partie intégrale du moulin, grace à un savant système de poulies.

 

La Trémie >

Une fois hissé par le monte charge, le sac de grain est déversé dans la trémie, le meunier d'une main experte jauge le taux d'humidité du grain, trop humide, il risquerait d'encrasser les meules.

La clochette   Le babillard

Le babillard >

Sorte de régulateur de débit, son tic-tac rythme l'écoulement du grain dans la meule.

< La Clochette

Au cas ou le meunier, comme dans la chanson se serait "endormi", celle-ci lui signale que la trémie est bientôt vide et qu'il faut faire le plein.

Et ce n'est pas un "gadget", mais un élément indispensable pour le bon fonctionnement de toute cette merveilleuse machinerie.

Premier étage

< Poutre meulière, hérisson et renvoi d'angle du treuil

Comme son nom l'indique la poutre meulière, est une pièce de chêne de forte section sur laquelle est posée le hérisson avec le renvoi d'angle servant d'élément moteur au monte charge.

Juste au dessus à l'étage supérieur, sont positionnées les deux meules, d'environ 2000 kilos l'unité, d'ou l'importance d'avoir une poutre meulière robuste, plus le poids du hérisson en fonte, pesant lui même un certain poids.

Rez de chaussée

Le Boisseau >

C'est par cette "goulotte" de bois appelée "boisseau" sous laquelle est accroché un sac que descend la farine. A sa sortie, machinalement le meunier plonge la main dans le sac, il en extrait une poignée qu'il fait rouler entre le pouce et l'index, s'il juge la finesse de la farine insuffisante, par l'intermédiaire d'un cliquet de bois il modifie les réglages. La farine s'écoule au rytme d'un quintal (100 kilos) l'heure, le meunier n'a pas de répit, il faut peser, lier les sacs de jute, grimper à la salle de mouture lorsque la "clochette" le prévient que la trémie est presque vide, etc.....

De cette pièce ou il se doit de rester, il écoute vivre sa machine, pas un bruit ne lui échappe, chaque craquement a une signification. A portée de main, une commande lui permet de régler l'écartement des meules suivant la finesse de mouture recherchée et les cordes de chanvre permettent de régler l'allure du moulin.

Regard vers l'océan ! Le Vent

Avant de libérer les ailes de son moulin, le meunier doit interpréter les messages secrets des nuages, il est de ceux qui ont appris le langage d'éole.

Comprendre et entretenir le moulin est une chose, apprivoiser ses mécanismes en fonctionnement en est une autre. Il n'y a qu'à regarder le meunier penché à sa fenêtre et scruter l'horizon , pour comprendre que seule, la girouette sans l'oeil et l'oreille avisé du meunier, ne saurait être suffisante.

Rappelons-nous, Rairé n'est pas érigé sur une butte, il est planté au beau milieu du marais breton, à moins de dix kilomètres à "vol de mouette" de l'océan. Et justement, la préférence du meunier "maraîchin" va vers ces vents de secteur ouest à nord-ouest, que les gens d'ici appellent "salaï" et "norrois", ils sont doux et réguliers et le moulin "ronronne" doucement au rythme du tic-tac du babillard.

En revanche, le meunier se méfie toujours des rafales du sud-ouest, nées dans le Golfe de Gascogne, impétueuses, chargées de pluies et parfois annonciatrices de tempêtes. Ces bourasques sont maudites pour le moulin, qui gémit et craque de tous ses engrenages.

Il maudit également ces vents de terre (nord-est sud-est) secs, continentaux, inconstants, appelés "vents du haut", ils sont souvent accompagnés d'un ciel clair durant trois, six, voire neuf jours, un vent traître qui brûle les blés et provoque des tourbillons de poussière les "vayles de vent". La meule s'affole, puis s'endort presque aussitôt, pas de répit pour le meunier !!

Tel une vigie, du haut de sa tour le meunier scrute l'horizon en direction de l'océan, guettant dans la fuite des nuages, dans le moindre mouvement des peupliers et des tamaris, les signes infaillibles de l'ouvrage à venir.

Il attend avec impatience le retour du vent du large parti quelques heures plus tôt avec le jusant.

Activité du Moulin de Rairé aujourd'hui

Le Moulin de Rairé, à la fois monument historique, (le moulin de Rairé est inscrit à l'Iventaire Supplémentaire des Monuments Historiques depuis 1974), outils pédagoqique, lieu touristique etc....il n'en demeure pas moins encore au XXIe siècle.......... un outil de production à part entière.

Bien entendu la farine panifiable n'y est plus produite par les meules en pierre (interdiction).

Mais depuis déja très longtemps, lorsqu'il avait fallut augmenter la production pour faire face à la conccurence des minoteries industrielles, le moulin de Rairé s'était équipé au rez de chaussée d'un cylindre-convertisseur en fonte.

Ce nouvel équipement, grace à un ingénieux système de poulies, courroies et engrenages divers est activé par le moulin lui même.

Et les meules pendant ce temps ! Elles continuent de moudre !

Mais ! toujours pour les mêmes causes, pour palier au manque de travail dû à la conccurence des minoteries industrielles (sans parler des contraintes administratives) Rairé s'était reconverti dans l'alimentation animale, qui elle, est autorisée avec les meules en pierre.

Rairé Hier.......et

Dans une salle d'exposition est entreposé l'ancien arbre de couche du moulin de Rairé, celui-ci a touné de 1947 à 1979.

Plus impressionnant au sol que dans les airs, mais superbe ouvrage !

Rairé demain.......

Rairé demain !! Je n'ai pas la réponse du meunier, mais au vu de ce qui est entreposé dans une "remise" contigue au moulin, je me suis laissé dire que l'avenir on y a pensé depuis "belle lurette".

En effet cet arbre de couche taillé dans un fût de chêne de cent cinquante ans, n'est autre que le futur arbre de couche du moulin de Rairé.

Taillé dans un fût de chêne vert, celui-ci sèche lentement au rythme des saisons, en vue d'un futur remplacement ou défaillance de l'arbre en activité.

Ainsi va la vie à Rairé !!

Les Moulins et les guerres de Vendée

On ne pouvait pas présenter cette page sur les moulins de Vendée, sans évoquer le rôle qu'ils jouèrent durant les guerres civiles (de 1793 à 1796) qui ont ravagées la Vendée militaire, baptisée "département vengé", les forces républicaines, sous l'égide des représentants du peuple, se sont acharnées à détruire systématiquement tous les moulins.

Le premier objectif n'était-il pas d'affamer la population ?

C'est surtout lorsque "les bleus" s'apperçurent que les moulins, par la position de leurs ailes, indiquaient aux insurgés les mouvements des troupes ennemies que ceux-ci s'employèrent à les anéantir.

Rairé échappa au désastre, mais quantité de moulins furent incendiés, certains furent reconstruit, mais beaucoup d'autres disparurent à jamais, on utilisa la pierre pour d'autres constructions ou pour "empierrer" les chemins.

Remerciements

Pour la construction de cette page, mes remerciements iront à Richard Billet l'actuel meunier de Rairé, qui m'a permis de connaître Rairé de l'intérieur et parfaire mon ignorance en matière de moulin.

Son étude personnelle sur "son moulin" m'a été d'un grand secours.

Un salut amical également à Marcel Burgaud (que je n'ai pas l'honneur de connaître) beau-père de Richard Billet, l'ancien meunier de Rairé aujourd'hui à la retraite, mais que l'on apperçoit dans son travail sur différents clichés.

Bravo Messieurs pour l'ensemble de votre oeuvre et faites que Rairé puisse "ronronner" encore durant de nombreuses décénies au coeur du "Marais breton"